mardi 26 octobre 2010

Les meilleures choses ont une fin ...



Avec un peu de recul, l’idée de terminer cette belle aventure par une course « à la maison » était vraiment une excellente idée ! Ras le bol de ces voyages, de ces déplacements crevants et de toute la fatigante mais inévitable organisation logistique (la partie immergée de l’Iceberg !), quel bonheur simple que de dormir dans son propre lit la veille de la course et de ne faire que quelques kilomètres pour rallier le départ de cette 12ème et dernière épreuve … sans même encore parler de la fête à l’arrivée !


Il fait magnifique ce dimanche 10 octobre 2010, et ça c’est totalement inespéré pour cette période de l’année dans notre beau pays. Et s’il fait frais à 8h du mat’, la température va monter

jusqu’à plus de 20° au cours de la journée !


Lumière !

Je suis incroyablement détendu au départ. Je me surprends à discuter encore de tout et de rien quelques minutes à peine avant le coup de pistolet. Moi qui suis plutôt du genre très concentré dans ce genre de circonstances. (Ma vision des choses, confortée par cette belle année sportive, est d’ailleurs la suivante : le don ou les qualités innées pour ce genre d’épreuves peuvent sérieusement être compensés par un entraînement sérieux – et copieux, il est vrai -, une organisation sans faille et surtout une bonne gestion des efforts !)


Etre décontracté, c’est bien, mais je n’ai aucune idée de mon réel potentiel du jour. L’enchaînement de toutes ces épreuves m’a plutôt obligé à beaucoup récupérer pendant les intervalles … avec hélas bien peu d’entraînements spécifiques de course à pieds depuis bien longtemps ! … Pour une fois, je parviens à me convaincre avec un très vague « on verra bien !» … ça sent vraiment les vacances ! ;-)

C’est parti.

A peine 2500 participants au départ de ce Marathon, ce qui signifie qu’après à peine quelques centaines de mètres la voie est suffisamment dégagée pour laisser une pleine liberté à la foulée… pour autant, bien sûr, que cette foulée soit disponible en magasin ! Le calcul est simple : pour boucler les 42.195 km en 3h30, il suffit d’enchaîner tous les kilomètres en dessous de 5’. En gardant à l’esprit que c’est plutôt à la fin du parcours que cela se gâte.

Rappelons nous quand même (et c’est encore clairement écrit sur le site des « XII travaux » !) que l’objectif initial était de faire de ce marathon une sortie de « tour d’honneur » sans la moindre prétention chronométrique. Mais bon, l’appétit venant en mangeant, j’ai quand même envie de jouer le jeu et de voir ce qu’il reste dans le réservoir après 8 mois d’efforts. Les 3h21 réalisés à Barcelone le 7 mars sont déjà un lointain souvenir …

Les premiers kilomètres sont courus « dans les temps », mais bon, tous les coureurs de Marathon vous le diront, ces kilomètres-là sont TOUJOURS dans les temps …! Les chronos, borne par borne, tournent aux alentours de 4’45 -4’50. La vitesse me satisfait, mais par contre la fréquence cardiaque s’affiche déjà aux alentours de 150/155, soit 10-15 pulses de plus qu’à Barcelone en début de parcours … L’explication est extrêmement simple : Mon organisme me prévient gentiment ( ?) qu’il est fatigué – et c’est un euphémisme - de la succession d’efforts que je lui ai imposé cette année. Pas très encourageant pour la suite de la course ...

Km 18. Ca va encore un peu se compliquer.

Au carrefour du Boulevard du Souverain et de l’avenue de Tervuren, après quelques encouragements familiaux très appréciés (ma mère vient vérifier que je terminerai bien cette aventure en vie, tandis ma nièce Tatiana essaye désespérément de me suivre en courant sur 50 mètres – je rigole, Tati ! -) … ça commence à sérieusement grimper. Bien sûr rien à voir avec le parcours de l’UTMB, ni même celui du Marathon de l’Embrunman … mais les circonstances sont bien différentes.

Au « sommet », passage à mi parcours. Le « semi » a été couru en 1h44. Calcul instantané, il suffirait de faire « x 2 » pour atteindre la Grand Place en moins de 3h30. Mais je sais déjà très bien à ce moment-là que ce ne sera pas le cas. Je n’ai participé qu’à 2 Marathons dans ma vie et j’ai toujours échappé au « coup de massue » du 32ème ou 35ème kilomètre, mais je sais (je « sens ») très bien que si je continue sur le même rythme je n’y couperai pas cette-fois-ci.

Je ralentis donc prudemment. 5’ au km, puis 5’10 … même 5’20.

Bon à partir de maintenant je ne regarde plus ce p… de chrono. On va essayer de terminer en bon état sans perdre trop de temps. Le « turning point » est situé au fin fond du parc de Tervuren, c’est in-ter-mi--nable. Mais à partir de là, c’est … tout droit ! Malheureusement il reste une bonne douzaine de bornes.

Voyons les choses du bon côté : il fait magnifique, dans une bonne heure le grand défi sera réussi et je fêterai « la quille » sur la plus belle place du monde … 60 minutes ! Une paille à côté des 142 heures nécessaires pour les 11 épreuves précédentes. (Et je ne parle bien sûr même pas des autres centaines d’heure d’entraînement nécessaires).

Je n’avance plus vraiment mais tout va bien :-) … la deuxième « ascension » de l’avenue de

Tervuren n’arrange rien …

Voilà les arcades du Cinquantenaire, et là, un petit miracle : 2 gardes du corps m’attendent pour m’aider à clôturer cette belle aventure. Ce sont bien sûr les Merzou Gars, James et Paul. Ils ont couru sur le parcours des 21 et m’ont attendu (euh, un bon moment, vue ma vitesse ;-)) pour m’accompagner jusqu’à l’arrivée. J’essuie très discrètement les petites gouttes qui entourent mes yeux, ce n’est pas le moment ! On a passé un paquet d’heures ensemble cette année, et on en a partagé des moments forts … je suis vraiment très heureux qu’ils soient à mes côtés pour ce moment symbolique.

La descente vers l’arrivée, on y est presque … l’émotion commence à étrangler ma respiration et à embuer ma vision.

J’essaye de profiter de ce moment important, et les « flashs » se succèdent : … je revis quelques foulées en longeant la Sagrada Familia, comment oublier cet improbable face à face, en pleine nuit, au sommet d’une dune du Sahara, ce très douloureux début de crampe sur une échelle métallique à Bouillon, le lever de soleil attendu après une interminable nuit à Steenwerck, je revois bien sûr mon « combat héroïque » avec une méduse au large de Marseille, je me rappelle des sensations exceptionnelles ressenties au passage au sommet du Galibier, puis moins de 12 heures plus tard, la montée vers l’Alpe d’Huez avec des cuisses en béton armé … sans oublier les pérégrinations d’un morceau de pizza lors de la 3ème ascension successive du Mont Ventoux, l’angoisse de l’échec face à ce pneu récalcitrant lors de l’Embrunman, le froid extrême au passage du grand Col Ferret, la défaillance de mon estomac à plus de 4600m d’altitude…

Nous pénétrons sur la Grand Place, elle est magnifique. A quelques mètres de la ligne d’arrivée, une grande banderole fabriquée à mon attention par mon frère et mes neveux … là, c’est sûr, plus moyen de retenir les émotions.

3h44. Pas terrible mais pas grave.

Quelques minutes plus tard, c’est la fête ! Famille et amis sont venus en force … l’endroit est exceptionnel pour cette célébration. Et au cours de l’heure et demie qui suit, ce sont plus de 20 bouteilles de Champagne seront sacrifiées pour arroser l’évènement … fameuse « réhydratation », la récup’ idéale ! ;-)

Pas facile de décrire par des mots les sentiments éprouvés … que d’images, que d’émotions. Et quel bonheur de pouvoir partager ce moment. Les Emails et les SMS pleuvent, certains viennent de très loin … je ne parviens pas encore totalement à réaliser que cette histoire s’est achevée.

Mais est-ce vraiment le cas ?

Et de douze …
Polo XII/XII

vendredi 8 octobre 2010

Et pour terminer ...



Voilà, voilà, quelques heures me séparent de la XIIème et dernière épreuve ...


Le Marathon de Bruxelles.


Plutôt sympa de terminer "à la maison", car y en avait un peu marre de tous ces déplacements !


Un peu plus de 42 kilomètes, je sais que cela parait bien peu en comparaison de l'accumulation de tous ceux déjà parcourus au cours de cette folle année 2010. Et pourtant je peux vous assurer que cela ne sera pas une sinécure. Car si le Marathon de Barcelone du mois de mars (épreuve inaugurale) avait été bouclé en 3h21, celui-ci va hélas durer sensiblement plus longtemps. Pour 2 raisons assez simples : la première est que le profil de la course de Bruxelles est suffisamment accidenté que pour oublier toute notion de record. La deuxième, tout bêtement parce que je suis FA-TI-GUE !


C'était prévu, mais les 142 heures nécessaires pour accomplir les 11 premières épreuves (et je ne parle même pas de l'entraînement, bien plus volumineux encore !) ont laissé de fameuses traces dans l'organisme. Les entraînements de ces dernières semaines ont confirmé qu'il était vraiment temps que cette petite plaisanterie s'achève ...


Quels chrono dimanche, alors ?


Je rêverais de tourner aux alentours des 3h30, mais chaque jour je me dis que cela n'est pas vraiment raisonnable. Donc : on verra ! Je suivrai mes sensations et ma fréquence cardiaque por esayer de trouver le "bon rythme", celui qui m'amènera sans encombre sur la Grand Place !


... Et si vous passez par là vers 12h30 -12h40, ce serait très sympa de venir partager une petite coupe avec nous (mes célèbres partners seront là !) Le bouchon de la première bouteille sautera dès le passage de la ligne d'arrivée ... lieu de rendez-vous (et de dégustation ;-)) sur la Grand Place mêm,e à quelques dizaines de mètres de là... ce sera facile de nous retrouver !


Et il fera beau à Bruxelles ce dimanche !


Polo

XI/XII



dimanche 19 septembre 2010

Au sommet !



L’aventure touche doucement à sa fin. Et ce n’est pas mon pauvre organisme qui va s’en plaindre ! Ce 11ème travail fut en effet bien plus pénible que prévu, et la fatigue accumulée ces derniers mois, et surtout ces dernières semaines, ne fut certainement pas étrangère aux difficultés éprouvées.


Nième voyage vers les Alpes cette année, ça aussi ça fatigue. A force, les caissières des restoroutes me ferait presque la bise quand je passe les voir … heureusement que cette fois-ci, ce devrait être la der’ de l’année !

Pour cette nouvelle tentative d’ascension au sommet, nous sommes à 4 sur le pont : les infatigables Merzou Gars (Papy et le Zoulou) m’accompagnent pour la 4ème fois cette année (Papy a participé à la Bouillonnante, les 2 ont couru le MDS et l’UTMB-CCC-TDS…) Et en Guest cette fois-ci , ce sera Juju, Ostéo au quotidien (au service de mes pauvres vertèbres !), mais surtout grand amoureux de la montagne et dont un des rêves est d’atteindre le sommet du Mont-Blanc … Et comme il faut réaliser ses rêves…


Voyage les yeux fermés le dimanche soir (Luxembourg, Metz, Nancy, Dijon, Bourg, Chamonix) et arrivée dans la nuit, suivi de quelques heures de sommeil seulement. Le matériel indispensable est loué dès l’ouverture des magasins le lundi matin pour nous permettre de rejoindre au plus vite notre guide à la « benne » de l’aiguille du midi.


Max. Originaire de Sallanches, la petite cinquantaine bien marquée, le visage buriné par une bonne trentaine d’années à user sa carcasse sur les pentes de la région. Le vrai guide comme dans les films, on s’attend à tout moment à un conseil sur le planté du bâton, et à ce qu’il nous propose à boire un vin chaud sur les pistes. Une caricature. Rajoutez-y le mot qu’il va prononcer 9000 fois dans les prochaines 72h : « impeccable ! », (Ou parfois « Impec », pour varier les plaisirs !), et ce parfois 3 fois dans la même phrase. Cela deviendra notre leitmotiv !


Le téléphérique au départ de Cham’ nous hisse donc à l’aiguille du midi, à 3842m. Première journée de (re)prise de contact avec le matos de haute montagne. Baudrier, corde, et surtout cramponnage. Nous effectuons donc nos premiers pas sous les yeux de touristes japonais très enthousiastes, ravis à l’idée de rencontrer « de vrais alpinistes ». (En tous cas, ils en sont convaincus !) Mitraillage photo en règle (Juju avec Madame Honda, Papy avec Monsieur Yoshido, etc… ) excitation extrême des nippons à la vue d’un véritable piolet …! Hoooo ! Décidément, c’est le jour des clichés et des caricatures.


Et pourtant ces premiers mètres pour quitter le refuge de l’Aiguille du midi et nous engager sur la neige sont particulièrement délicats : il nous faut évoluer sur une minuscule arrête de glace et de neige, la paroi gauche étant particulièrement verticale et … quasiment sans fin. Bon, je ne regarde plus à gauche et je fixe mes yeux sur les pas de mon prédécesseur. Quelques minutes de bonne trouille, partagée par tous. (On en a surtout parlé après, d’ailleurs ;-))


Après ce début périlleux, cela se simplifie et on se met en route pour une bonne répétition générale en traversant la vallée blanche pour rejoindre l’Italie. Le temps est magnifique ! Retour par une télécabine assez lente avant la récompense ultime sous la forme d’un sandwich très attendu dégusté sur la terrasse du refuge de l’aiguille du midi, à l’abri du vent et le nez vers les sommets … sans oublier le supplément de mayonnaise trimballé toute la journée. Merci Juju !


Retour à Chamonix ce lundi soir, pour une dernière nuit à l’hôtel avant le vrai départ de la grande aventure !


Mardi 7:00. Départ de l’hôtel pour rejoindre St Gervais. Trop tôt pour avoir droit au petit déj’ … On a juste droit à un café avalé en vitesse … et une petite tranche de cake ! (merci Bernadette !) faudra tenir avec ça jusqu’à 3100m d’altitude.
Gare du tramway de St Gervais. 7:45. Rendez-vous avec nos 2 guides. Et oui, le règlement c’est le règlement : une cordée est composée au maximum d’un guide et deux accompagnateurs (oui, vous pouvez dire touristes) Comme nous sommes 4, ce sera 2 cordées … et donc 2 guides. En plus de l’impeccable Max, il y aura donc Stéphane. Son antithèse. 30 ans, pas un gars du coin, originaire des banlieues, sympa et compétent mais pas particulièrement enthousiaste … Pas grave, on fera avec.


Une heure de tramway à crémaillère est nécessaire pour nous hisser jusqu’à 2000m d’altitude. Pas plus haut. D’habitude ce petit tortillard transporte les candidats alpinistes jusqu’au « nid d’Aigle » à 2372m, mais divers travaux (pare avalanche, poche d’eau sous un glacier) l’obligent à nous débarquer plus bas que prévu. Faudra compenser avec les guiboles.


Et c’est le début de l’ascension. Les premiers 600 mètres de dénivelé ressemblent un peu aux chemins empruntés par les « trails » du mont Blanc comme il y a 2 semaines. Du connu, donc. Au menu une bonne petite pente, mais avec un sol stable et une évolution « libre » (comprenez par là, « non encordés ») Nous avons même le plaisir de croiser un groupe de bouquetins, apparemment pas du tout impressionnés de notre présence sur place. (En tous cas beaucoup moins que les Japonais de la veille …)


Vers 2500 ou 2600m, cela se complique. Les pierriers et la pente un peu plus abrupte nous imposent le port du casque et à l’encordement. Papy et le Zoulou lient leur destin à Max, Juju et moi seront drivés par Stéphane. L’évolution est un peu plus lente, certains passages sont un rien plus techniques. Mais nous sommes très bien conseillés et tout se passe finalement très facilement.


Les premières neiges sont atteintes vers 3000m d’altitude, juste avant d’arriver au refuge de Tête Rousse. (3167m) Il est un peu plus de midi, et un repas complet y est prévu. Avec le très maigre petit déj’ de ce matin, c’est une vraiment excellente nouvelle ! En une bonne heure, le repas est avalé, les batteries sont rechargées et nous sommes prêts à affronter la véritable difficulté du jour.


Du refuge de Tête Rousse, il suffit de lever le nez pour voir le refuge du Goûter, situé lui à 3800m d’altitude. Mais attention, pour le voir il faut vraiment lever le nez très haut ! Un bon 600 m d’à pic ou presque, très très impressionnant. Bien sûr, ce n’est pas encore de l’escalade « en rocher », mais c’est tout de même de la vraie grimpette « avec les mains et les pieds », en tous cas beaucoup plus technique que tout ce que l’on a fait jusque là … mais il faut ajouter que c’est aussi très agréable.


2 bonnes heures et demie sont nécessaires pour atteindre notre objectif du jour. Vers 16 :00 nous arrivons en effet au refuge du Goûter, ultime étape avant le coup de reins final pour atteindre le sommet. Mais ça, ce sera pour demain !


Découverte de notre couchette dans le refuge. (La 99 pour moi, j’aime bien ces 2 chiffres !) Petit essai de sieste, perturbée par des sensations assez désagréables : d’abord le froid, puis le cœur qui bat la chamade, le souffle qui s’emballe … On a beau le savoir avant le départ, à 3800m le corps réagit de bien curieuse manière … (et c’est loin d’être fini)


A 18h00, c’est le repas du soir au refuge. Par rapport à ce qu’on m’avait dit, je m’attendais à bien pire: De la soupe en abondance et un très honnête couscous, vraiment pas de quoi se plaindre. J’essaye de boire beaucoup d’eau pour garantir l’hydratation (au risque de devoir me lever la « nuit » pour évacuer l’excédent … dans le froid.) mais on arrose aussi sagement l’évènement avec 2 bouteilles de rouge (euuh … bien rouge, le rouge !…) Ca c’est sensé faciliter le sommeil ;-). A voir.


Le coucher de soleil est magnifique. Difficile de décrire cette atmosphère quasi surréaliste, ce halo qui floute légèrement les montagnes en les colorant de rose ou d’orange, ce ton particulier que prend alors la neige des sommets … mais nous avons peu de temps à consacrer à ces merveilles, il est bientôt 8h du soir et le réveil est prévu vers 2:30 …


Quelle horrible nuit. Je m’habille d’abord chaudement pour répondre au froid ambiant, mais les 40 organismes humains réunis dans cette pièce exigüe vont faire très rapidement monter le mercure. De froid, j’ai ensuite chaud puis très chaud … et enfin trop chaud ! Résultat, pas moyen de fermer l’œil ne serait-ce qu’un instant pendant les 3 premières heures … je me tourne et me retourne dans tous les sens (pas facile avec la taille de le place qui nous est attribuée), j’essaye de me détendre, de jouer sur la respiration, rien n’y fait … vers 11h ou minuit, je parviens enfin à sombrer de temps en temps dans un sommeil très léger, mais sous la forme de 2 ou 3 blocs d’une dizaine de minutes, pas plus. Vraiment pas terrible. James m’a affirmé ensuite ne pas avoir dormi la moindre minute … Pas idéal comme préparation finale.


Vers minuit et demie, une grande partie du dortoir se lève comme un seul homme et se prépare déjà à partir. Bruit, lumières, chuchotements,… ce n’est pas ça qui va nous aider à nous reposer.


Il est 2:15. Deuxième grosse animation dans le dortoir. Cette fois-ci, nous suivons le mouvement, il n’y a pas vraiment de raison d’attendre un quart de plus dans ces conditions … Les derniers préparatifs sont un peu compliqués car ils nécessitent des prises de décision pas simples : combien de couches prévoir pour monter, lesquelles mettre au départ, que prendre en réserve , …


2 :45. Le petit déjeuner est difficilement avalé. Une petite tartine un peu dure et une tranche de pain d’épices … accompagnées d’un grand chocolat chaud que j’ai préféré au thé et au café. Un bon choix ?


Il est 3h15 lorsque nous quittons le refuge, cramponnés et encordés. Avec la lampe frontale vissée sur le front, notre champ de vision est assez limité : Je vois … Stéphane, auquel je suis physiquement lié, juste là 3 mètres devant moi, et j’aperçois aussi … le sol blanc éclairé par un cercle de lumière de 4 à 5 mètres de diamètre. C’est tout. Je « devine » Juju qui me suit, pour le reste, c’est la nuit la plus profonde.


Nous commençons directement par une petite « butte » de quelques dizaines de mètres. Ces premiers pas m’épuisent. Pas très bon signe. Heureusement que nous arrivons vite sur une crête plus facile, où se succèdent quelques bosses assez supportables.


On attaque alors le fameux dôme du Goûter. Soit environ 500 mètres de dénivelé positif à grimper pour atteindre 4300m.


Ca va vite, ça va même trop vite. En tous cas pour moi. Chaque fois que la pente est un rien plus verticale je sens mon cœur s’emballer et j’entends ma respiration haleter comme un cocker qui vint de ramener un bâton. Vues les circonstances (altitude, 4h du mat’, nuit pas très réparatrice, …), je pense tout d’abord que c’est normal et j’essaye de trouver le bon rythme. Mais rien n’y fait. A chaque pied que je pose sur la neige, je rêve que Stéphane se retourne et nous annonce « une petite pause ». Je me sens extrêmement fatigué et ce rythme imposé par une cordée ne me convient pas du tout


La souffrance est donc quasi continue pendant cette première partie d’ascension. Chaque pas devient de plus en plus lourd, et je me rends compte que je ralentis sérieusement le groupe. Cette côte n’en finit pas. Il faut dire que l’on peut juste en deviner la profil par les halos lumineux des cordées qui nous précèdent, pour peu de ne pas les confondre avec les étoiles ! La direction est la même : c’est là-haut.


Cela fait un bon bout de temps que je rêve du break que l’on va faire au passage à 4300m. Au lieu de cela, Stéphane nous fait légèrement accélérer ( ?!) dans la petite descente qui suit, et ce juste avant d’aborder à nouveau une courte montée qui doit nous amener à l’abri Vallot à 4360m environ. Cet effort inattendu épuise les derniers restes de mon énergie.


La cordée de Paul et James a bien dû partir plus d’une dizaine de minutes derrière nous. Mais cela fait déjà un petit moment qu’ils nous ont rejoints, et je sais très bien qu’ils n’ont pas accéléré… Petit arrêt (enfin !) au niveau du refuge Vallot. J’essaye de ne pas m’effondrer en prenant appui lourdement sur mes bâtons. Des efforts exténuants, j’en ai vécu un bon paquet ces derniers mois, c’est sûr que quelques minutes vont me permettre de récupérer …


Je redresse la tête pour observer un instant Julien, James et Paul. Je m’attends à voir des visages marqués par l’effort, des grimaces à la hauteur de mes propres souffrances. Ce n’est pas du tout le cas, ils ont l’air d’aller très bien, … eux. C’est clair, je suis le maillon faible sur ce coup-là, et j’avoue que je n’aime pas ça du tout.


Je précise que la suite de ce récit n’est peut-être pas la réalité historique. Car à partir de cet instant-là, pas mal de choses sont confuses et mon cerveau à enregistré les évènements et les sensations en pagaille … On se remet en route, la cordée de Stéphane devant la cordée de Max. Nous sommes à l’attaque de l’arête des bosses et c’est clairement mon rythme de crapaud qui est imposé à tous. Ces quelques minutes d’arrêt ne m’ont absolument pas permis de récupérer, je suis complètement crevé, je n’en peux plus … je voudrais que chaque pas soit le dernier.


J’entends Juju m’encourager. Il doit me voir tituber et perdre l’équilibre quasi à chaque pose du pied au sol. Je ne sais même plus pourquoi je marche. Je redresse très rarement la tête, mais c’est pour la baisser aussitôt : cette fois le jour est levé et l’on aperçoit les pentes … et comme le sommet semble encore bien loin !


Après la grande bosse, c’est la petite. Mais tout va de plus en plus mal. On s’arrête enfin quelques instants, Max me pose « la » question : ça va ? Que voulez-vous que je réponde ? Je voudrais sourire et dire « impecc ! » mais je n’y arrive pas. Je me redresse alors un instant et mon regard qui croise les 5 autres est la plus éloquente des réponses.


Et s‘ils n’avaient pas encore compris la gravité de mon état, je complète l’information : je suis pris d’un petit hoquet. Cette petite irritation sur ma gorge a un effet particulièrement désagréable et très peu rassurant : mon estomac se retourne en 2 mouvements, et hop je vomis chocolat chaud devant mes pieds, puis zou je me retourne pour évacuer les 2 tartines derrière les talons. Vomir après un effort, je connais, c’est très gérable. Vomir alors qu’il me reste un bon 200 ou 250m de dénivelé, de plus de 4500m d’altitude, c’est beaucoup plus inquiétant.


J’essaye de ne pas regarder le guide, de peur qu’il décide de ne pas m’emmener jusqu’en haut. La possibilité de ne pas y arriver frôle mon esprit mais je l’évacue aussitôt. Tous les autres ont l’air de très bien s’en sortir, et l’idée que je ralentisse tout le groupe est presqu’aussi insupportable que la fatigue et la douleur. Malgré un cerveau au ralenti, une idée très désagréable me traverse l’esprit : les guides amènent, soit toute la cordée au sommet … soit personne ! Et il est bien sûr hors de question d’empêcher Juju d’arriver là-haut. Il faut donc ABSOLUMENT s’y remettre.


Dernière bosse. Le vent commence à souffler assez fort et mon visage gèle progressivement. Mais c’est bien moins désagréable que tout le reste. Les pas se font de plus en plus courts, et j’ai parfois l’impression de reculer … Plusieurs fois je suis à 2 doigts de tomber, et je pense me rappeler sentir la main ferme de Juju dans mon dos pour me maintenir debout.


7:20. L’arête sommitale. Je n’y crois pas vraiment, mais on vient de s’engager sur la dernière partie de l’ascension, cette crête est légèrement en montée et elle nous emmène vers le sommet tout proche ! L’axe de cette progression finale est pile poil vers le soleil levant que nous prenons en pleine figure. Il n’y a pas un seul nuage, les conditions sont vraiment parfaites.


4807m. Ca y est. Je parviens difficilement à me convaincre que nous sommes au sommet. Je suis dans un état second. Je voudrais pleurer mais je n’en ai même plus la force. Et puis de toute façon les larmes auraient gelé instantanément !


Il faut profiter de l’instant mais c’est difficile dans cet état-là. Le décor est magique. Nous sommes une quinzaine à nous partager quelques mètres carrés sur le toit des Alpes. La vue est indescriptible et j’essaye d’imprimer à jamais ces images dans ma mémoire. Il faut absolument immortaliser ces instants sur quelques photos. Nous en prenons quelques-unes, je devine même Juju au téléphone (et oui, il y a du réseau là haut !) … mais le vent nous refroidit très vite et pas plus de 5 à 10 minutes après notre arrivée il est temps de redescendre !


Il nous faut en effet encore descendre de 2800m de D- aujourd’hui ! Il est 7:30 et le petit train nous attend à 2000 à 15:45. Et oui, 8 heures de descente ! …


Dès que cela descend ça va mieux. Au fil des minutes puis des heures, je récupère progressivement mes facultés physiques et mentales. Et pourtant cette « désescalade » n’est pas toujours simple, parfois, même très technique … Je réalise aussi tout doucement que « c’est fait ! ».


Le repas du midi au refuge de Tête Rousse est très léger pour moi, (l’estomac n’est pas encore en plein forme, lui) mais enfin de retour à 3000m, tout va de mieux en mieux.


Le reste de la descente est encore émaillée de quelques anecdotes, la plus cocasse étant le déraillement de notre train à crémaillère et la petite sieste improvisée en pleine montagne !


Retour à Chamonix. Petit resto pour fêter ça (ça y est, l’estomac fonctionne à nouveau !) j’essaye d’éclairer mes compagnons de cordée sur toutes les souffrances ressenties au cours de l’ascension. J’essuie quelques vannes et autres moqueries bien méritées sur mes vomissements en altitude : c’est sûr, on me le rappellera encore pendant des années. Pas grave, on l’a fait ! Nous sommes arrivés tous les 4 là-haut, et la magie de ce moment ne nous quittera jamais. Merci Juju, Papy, Zoulou … Stéphane et Max de m’avoir traîné jusqu’en haut pour vivre ce moment unique.


Et de XI donc.

Depuis mes déboires de mercredi passé (jour de l’ascension), j’essaye de comprendre ce qui s’est passé. Mal aigu des montagnes ? Accumulation de la fatigue des épreuves précédentes ? Jour « sans » ? Je n’ai toujours pas la réponse, mais j’avoue que l’essentiel est surtout d’être passé au dessus et d’être arrivé malgré tout au sommet avec toute la bande !


Le bout du chemin est proche. Mais cet avant-dernier effort m’a coûté énormément d’énergie. Trois semaines me séparent du point final, à savoir le Marathon de Bruxelles, mais il va falloir sérieusement à me rebooster d’ici là.


Si je connaissais le dingue qui a concocté ce programme ! Ah, oui, c’est moi … ;-)

A bientôt,

Polo XI/XII

vendredi 10 septembre 2010

UTMB - TDS - CCC ? L'imprévu au programme de ce week-end un peu fou





(Je sais, je sais … mise à jour du blog un peu tardive … le ferai plus, c’est promis.)



C’est sûr, je le savais avant même le départ, cette 10ème épreuve s’annonçait comme particulièrement difficile: malgré le super boulot de Marlène et de Juju (Kiné et Ostéo de l’aventure), la fatigue des épreuves précédentes était encore bien présente et mon dos n’était pas dans le meilleur état possible … mais, bon, 11 jours à peine après l’Embruman, cela peut sans doute s’expliquer !



Mais par contre, excellente nouvelle, c’était à 4 que nous allions nous confronter à la montagne et à ses pièges ! En plus de mes fidèles acolytes des « Merzou gars » (Papy & Le Zoulou), Alain (« Saïmonne », déjà là pour la CCC 2009 et la Bouillonnante 2009 et 2010) complétait le quatuor.



Ouvrons une parenthèse. Pour essayer de comprendre au mieux l’enchaînement des évènements du week-end, résumons tout d’abord les courses prévues au cours de ce « week-end UTMB », considéré comme LE rendez-vous du trail mondial : 3 courses au programme (je ne vous parle pas de la PTL, ça compliquerait tout ! :-)) L’UTMB, soit un tracé de Chamonix à Chamonix, 166 km en passant par l’Italie et la Suisse. (Départ vendredi 27/8 à 18h30) La CCC (Courmayeur-Champex-Chamonix) soit 98km en passant par la Suisse, départ ce même vendredi mais le matin à 10h00. Et enfin la TDS (la nôtre ! Sur la trace des ducs de Savoie) De Courmayeur à Chamonix aussi … mais en passant par l’autre côté (Col du Petit Saint Bernard, etc.) 111km.Le départ de cette TDS devait être donné à minuit, donc après les 2 autres.



Nous voilà le vendredi et il me faut impérativement un maximum de repos avant d’affronter ces longues journées (et nuits !) d’effort … donc, sieste au programme de l’après midi du vendredi, re-sieste en début de soirée … Le repos est seulement perturbé par cette pluie incessante qui tambourine sur le toit de l’hôtel, mauvais présage.



Il est 22h30 environ lorsque nous nous préparons enfin pour le départ. Premier SMS de l’organisation reçu à ce moment précis: « Conditions atmosphériques catastrophiques, départ de la TDS retardée d’au moins 3 heures » … Première surprise. On se renseigne un sur le net et on apprend que l’UTMB a été « neutralisée » ( ?) aux Contamines… pas bon signe, ça !



Essai de re-pseudo-dodo jusqu’un peu avant 2 heures du mat’ … On se re-prépare, on est presqu’en route … re-SMS : « départ course TDS reporté à 10h du matin ; sur un parcours totalement différent » (qui ressemble à la CCC , en fait la 2ème partie du parcours de l’UTMB au départ de Courmayeur…) Sentiment assez mitigé, nous étions venu il y a plusieurs mois pour reconnaître le parcours, on s’y était donc préparé et voilà que tout change ! On apprend même via Internet (pourtant pauvre en info) que l’UTMB est définitivement ( ?) annulée …



Re-re- essai de dodo (mais la nervosité empêche un véritable repos …) Nouveau SMS vers 5h00 du mat’, incompréhensible celui –là (parlant de l’annulation de la CCC ??? et de navettes amenant certains coureurs de l’UTMB à Courmayeur dans les heures qui viennent …)



Je sais, c’est bien compliqué et pas vraiment compréhensible, tout ça. En fait ce fut exactement notre sentiment du moment !



Ce n’est qu’à 8h que nous étions enfin rassurés de notre participation à une course. La TDS était bien annulée aussi, mais nous étions autorisés à participer à la « course UTMB de remplacement » ! Un parcours auquel nous ne nous attendions pas, un timing complètement chamboulé. Sans le savoir, nous faisions partie de 1500 « heureux élus », à recevoir la possibilité de participer à cet UTMB-bis.



Au centre de Courmayeur ce samedi matin : un peu perdus et mélangés, des dossards bleus de la TDS, des dossards rouges de l’UTMB, tous un peu perdus et essayant de partager un maximum d’infos sur les évènements de la nuit … et jusqu’à la dernière seconde, des navettes déversent des concurrents (chanceux) sur la ligne de départ.



A 10h15, finalement, le grand départ est enfin donné. Ouf ! Et mieux encore: sous le soleil !


On en oublierait presque ce qui nous attend ! Mais après quelques centaines de mètres à peine, le retour à la réalité montagneuse est brutal : nous sommes au pied de la côte de Bertone, soit un dénivelé de 800 mètres à avaler sur à peine 4 km ! Assez violent comme mise en bouche. Et c’est d’ailleurs très rapidement le bouchon dans ce « single track ». Rien d’autre à faire que de « suivre » le rythme imposé, à la queue-leu-leu… A notre grande surprise, c’est James qui tire un peu la langue dans cette première difficulté. Le Zoulou est pourtant clairement le plus costaud d’entre nous, mais là, il peine à se mettre dans la course.



La météo est très convenable en ce début de course, il fait même chaud dans cette première ascension. Passage au refuge Bertone, puis parcours plus plat jusqu’au refuge Bonatti. De là, traversée à flanc de colline avant de descendre sur Arnuva. Il nous faut 3 heures pour rejoindre ce 3ème ravito, avec au passage une excellente nouvelle : la « barrière horaire » qui nous mettrait hors course est déjà bien loin derrière nous. Seul petit point gris, c’est le regard un peu hagard du Zoulou, pas encore tout à fait dans son assiette. Mais ne vous inquiétez pas pour lui, ça ne va plus durer ! ;-)



Arnuva, c’est le pied de la côte du Grand Col Ferret, soit là aussi 800m de dénivelé à prendre dans les dents en un peu plus de 4km. L’organisation nous prévient de « bien nous couvrir » (ont-ils reçu un coup de téléphone de ma mère ?), car il fait vraiment frisquet là-haut. Notre choix se porte plutôt sur un status quo vestimentaire, car dans une pareille ascension, c’est surtout d’avoir trop chaud que nous avons peur.



Hem, … il faut toujours écouter sa maman !



Au cours de la montée, le sol se fait de plus en plus meuble, puis la terre fait place carrément à de la boue … les grosses pluies de la veille ainsi que les participants de la CCC ont copieusement labouré le « chemin ». La pente est sévère mais c’est surtout le « climat » qui change au cours de l’ascension. D’abord une petite pluie, qui s’intensifie ensuite de plus en plus et qui se refroidit rapidement. Rajoutez un vent de plus en plus fort en se rapprochant du sommet pour devenir carrément glacial ! Ce sont des moments au plaisir limité ;-) Le dos courbé, les yeux mi-clos fixant le sol, la progression est assez périlleuse …



La suite tient carrément du film d’horreur de série B. D’abord tout le côté droit de mon visage est progressivement gelé. Puis je perds la sensation au niveau des mains, doigt par doigt, jusqu’à ne plus pouvoir tenir les bâtons … et malgré cela l’effort reste intense car la pluie qui ruisselle sur mon front fait couler le sel de la transpiration dans mes yeux ! Pas super drôle tout ça en même temps, surtout que tout le « team » vit la même galère...



Il faut faire quelque chose et vite si nous souhaitons ne pas finir nos carrières de trailers sous la forme d’(abominables) hommes des neiges sur la frontière Italo-suisse ! Arrêt de l’équipe à quelques centaines de mètres du sommet : Hop, une couche imperméable est rajoutée sur le corps, et zou, les gants sont enfilés tant bien que mal (plutôt mal d’ailleurs, pas facile à faire avec 10 doigts gelés !)



Pas le temps de profiter de la vue ( ?) au passage au Col, et heureusement pas de douaniers Suisses trop zélés pour nous obliger à nous arrêter au passage de la frontière. Il est temps de basculer vers la vallée en espérant vite se réchauffer.



Ho, ça glisse.



Ce devrait être une partie très agréable avec d’abord une belle descente et un loooong faux plat descendant vers la Fouly. Mais le sol est tellement boueux que chaque appui tient plus du patinage artistique que du trail classique. Autour de nous les triples Axel et autre « double boucle piqué » sont légion. (Bref, pas mal de chutes) Toute cette boue au milieu des cailloux et des racines, cela demande vraiment une concentration de tous les instants.



Nous nous en rendons bien compte dès ce moment-là : Faudra oublier les « descentes récup » jusqu’à Cham, et plutôt songer à entonner le nouvel hymne de circonstances : « la gadoue, la gadoue… »



Après 6 heures d’effort (et oui, déjà), nous voilà au ravito très accueillant de la Fouly. Nous avons retrouvé quelques couleurs et la sensation de la plupart des parties du corps (en tous cas les plus utiles, vues les circonstances ;-)) On ne néglige ni la nourriture, ni la boisson, et ce sans vraiment se presser, il se confirme que les barrières horaires avancent bien moins vite que nous et on a décidé d’en profiter !



A la remise en route, le retour à l’extérieur est un peu frais (on a retiré une couche pour garder des réserves pour le soir et la nuit !)Il n’est pourtant même pas 17h00 ! Et ce sera comme ça à chaque remise en route dorénavant.



La Fouly – Champex. C’est d’abord une bonne heure et demie de parcours facile, puis une belle petite côté pour se remettre en jambes. On croise quelques ravitos « sauvages » organisés par des enfants du coin, très sympa ! La montée vers Champex est par contre plus longue que dans mes souvenirs … c’est amusant de constater que des sensations peuvent être très différentes d’une année à l’autre.



Champex, Pichon city. (Private joke à l’attention de Lucio Pichon l’escrimeur, l’homme qui s’est arrêté 3 années de suite à Champex dans sa quête du Graal CCC … parait même qu’il aurait une chambre d’hôtel en time sharing dans le coin ! je sais, je suis une mauvaise langue. La preuve, cette année il a même été jusqu’à … Trient ! – Lucio, n’hésite pas à te venger, je suis prêt ;-))



J’avais un souvenir atroce de l’ascension suivante. Bovine ! Rien que l’évocation de le nom de cette côté ou « même les ânes ne passent plus » me fait frémir en me rappelant l’expérience de l’année passée : les énormes enjambées nécessaires pour se hisser pas après pas, les rochers, les arbres, mes jambes quasi impuissantes face à toutes ces difficultés, mon estomac retourné, la neige, le froid … bref, ce fut pour moi un véritable cauchemar en 2009 lors de la CCC.



Nous sommes donc (très) prudents dans les derniers kilomètres avant de l’aborder.



Dès le début de la pente, Papy donne le rythme et les 3 autres se blottissent dans sa foulée… Et puis … tout se passe très bien ! La pente est très sévère, les rochers glissent, les enjambées doivent être très amples … mais tout se passe bien. Le Zoulou (de nouveau en pleine forme, d’ailleurs) ne peut évidemment s’empêcher de nous dire : c’est ça Bovine ? Pas de quoi en faire tout un plat … Rien à lui répondre, il a raison, vraiment rien à voir avec le cauchemar de l’année passée ! Nous franchissons donc cette difficulté dans d’excellentes conditions …



La descente est un peu plus périlleuse, mais c’est toujours dû à ce sol épouvantable …



Vers 23h30 nous arrivons à Trient, dernière escale helvétique. Apparition très appréciée de Sainte Bernadette. Non, non, pas encore d’hallucination, c’est l’épouse de Papy qui joue le rôle d’assistance de luxe … et il faut avouer que c’est très appréciable ! La température extérieure a considérablement baissé et chaque ravito (au chaud) est suivi de quelques minutes bien pénibles lors de notre remise en route …



Plus que 2 montées !


Si je ne parle pas jusqu’ici de fatigue ou de difficultés majeures, c’est que sur ce point-là, tout va vraiment très bien ! Bien mieux qu’espéré quelques jours auparavant alors que je m’effondrais tous les soirs dans mon canapé malgré des journées passées à … récupérer ! Je commence à me dire que le bout du tunnel se rapproche et que ces XII travaux ne seront bientôt plus qu’une liste de souvenirs.



C’est toujours dans ces moments-là que cela se complique un peu. La montée de Catogne – Les Tseppes est abordée un peu vite au goût de mes jambes qui ne se sont pas encore réchauffées depuis notre sortie du chapiteau de trient. Dur, dur de se remettre dans le rythme après 13 heures d’effort. Saïmonne et moi tirons un peu langue, mais on s’accroche !



Les Tseppes, c’est « Stairway to heaven » (répétez plusieurs fois cette phrase, vous allez vite comprendre le jeu de mots idiot)



Toutes les descentes sont pourries sur le parcours, mais celle-ci c’est vraiment le pompon ! Des flaques, de la gadoue inextricable, des rochers trempés et des racines glissantes … pour terminer par un bain de boue sur la fin de la piste de ski de Vallorcine.



3 heures du mat à Vallorcine. Nous voilà de retour en France. Dernier grand ravito avant l’arrivée à laquelle on commence doucement à penser. Alain est un peu cuit mais il a fait du super boulot pour suivre jusque là. On rajoute tous une couche avant de sortir … mais cela n’empêche pas le froid de nous assaillir à la sortie de la tente. Nous passons à côté de grands feus, et l’envie est très grande de s’en approcher pour se réchauffer … mais on sait aussi que la sensation de froid sera encore plus pénible en s’en éloignant.



Il nous reste le très gentil Col des Montets … suivi de la terrible Tête aux vents !



Arrivés au col, notre regard est attiré vers une guirlande de lucioles en plein vol stationnaire. Ce ne sont pas de lucioles … c’est le ballet de dizaines de lampes frontales de trailers en pleine ascension de la Tête aux Vents ! Je dois presque forcer ma nuque pour l’orienter vers le zénith. C’est un véritable mur ! 900 mètres de D+, le bouquet final !



Mais une côte n’est pas l’autre. Je ne peux pas expliquer pourquoi, mais cette ascension que je crains beaucoup se passe particulièrement bien ! Je prends la tête du groupe et je me lance dans un rythme agréable ( !) et régulier. James suit facilement, Paul est un peu en retrait mais il garde aussi un œil sur Saïmonne qui arrive tout doucement à la fin de son réservoir …
Et dire que la CCC a tété arrêtée ici, 24 heures plus tôt … c’est vrai que le sol est encore détrempé, mais plus de traces des torrents d’eau et de boue qui dévalaient cette pente la nuit passée. Et tant mieux !



La fin de l’ascension est interminable (on croit chaque fois avoir rejoint le sommet … puis ça repart !) et une fois en haut, on déchante. La descente s’annonce vraiment « casse-gueule » ! Il faut se laisser « glisser » sur de gros rochers détrempés, trouver chaque fois un appui qui ne se dérobe pas trop, sans parler de la boue omniprésente entre les pierres, de ces mêmes pierres qui décident de glisser les unes contre les autres. Pas simple pour des guiboles en action depuis bientôt 20 heures.



La Flégère. Minuscule tente ravito perchée sur le sommet des pistes de la station. Un bon thé très sucré calme la très désagréable acidité qui reflue la gorge depuis quelques heures … cette fois-ci, c’est enfin la descente finale vers la ligne d’arrivée. Les chemins sont bien plus agréables que dans les descentes précédentes, c’est sûr c’est le moment de « profiter » !



Le Zoulou pète la forme. Papy a quelques petits bobos mais ça tient le coup. De mon côté, c’est le tendon rotulien qui est assez douloureux (tout ce dénivelé négatif avec des appuis qui glissent, faut pas chercher plus loin !) mais à part ça je me sens très bien. La petite lumière rouge de Saïmonne s’est allumée, il est « sur la réserve » et on va le laisser calmement terminer cette descente à son rythme.



Les derniers kilomètres sont presqu’agréables. Le soleil s’est levé (magnifique !), un énorme nuage de brume bouchait Chamonix, on observe sa dissipation en direct … il n’y a pas grand-chose d’aussi beau que la montagne !



Après un peu plus de 22 heures d’effort, les Merzou Gars en pleine forme franchissent la ligne de la course. (Et à notre grand étonnement nous recevons une veste de finisher « UTMB » ?!) Bon, ce n’était pas la course prévue, mais vues les circonstances nous n’allons pas nous plaindre. Tout c’est passé plutôt facilement et agréablement pendant la course … les problèmes, ce fut surtout … avant ! Alain nous rejoint un gros quart d’heure plus tard, au bout du rouleau, fourbu … mais ravi !



Côté bilan personnel, je sais qu’avec cet enchaînement délicat Embrun-Ultra trail je viens sans doute de passer le cap le plus difficile des XII travaux et que rien ne devrait plus m’arriver. Mais comme c’est toujours au moment où l’on ne s’y attend pas que cela arrive …



… Car ne me demandez pas de détails, mais quelques heures après la course, au cours de la sieste pourtant bien méritée, un faux mouvement me coince complètement la colonne lombaire ! Le lundi je ne suis quasiment plus capable de bouger, impossible de m’incliner ni de porter un poids de plus d’un kilo… le retour à Bruxelles est chaotique et mon état nécessite une intervention rapide de l’équipe de secours, Marlène et Juju. Suivent quelques jours difficiles qui expliquent le retard de l’écriture de ce récit. Quelques jours de doutes aussi…



Mais nous sommes maintenant le 9 septembre et ça va beaucoup mieux ! Et on y est presque …



Ce fut d'abord 9 jours de repos sportif complet (je ne savais plus ce que c’était !) avant de reprendre doucement la course. Ce n’est pas encore brillant, mais ça revient. Bref, ce petit contretemps va réanimer le suspense ! ;-)



La suite ?



Et bien il faut espérer que Madame le Mont Blanc se laisse enfin escalader au cours des jours prochains (départ à Chamonix ce dimanche, ascension entre le 13 et le 16/ 9) puis que mes pauvres jambes retrouvent suffisamment de rythme pour parcourir les 42 bornes du Marathon de Bruxelles le 10/10/10



Et puis … une année sabbatique !?



Polo
X/XII

vendredi 27 août 2010

A 3 heures du départ du Xème travail : assurément le plus dur !

Dos coincé, jambes fatiguées, quelques (gros) doutes ... rajoutez une météo catastrophique (orages, pluies diluviennes ...) et vous comprendrez que les 30 heures qui viennent s'annoncent particulièrement aléatoires !

Suivez la course EN DIRECT sur le site de l'ultratrail www.ultratrailmb.com

Course TDS - départ vendredi à minuit

Dossard 8464

avec mes potes Alain, Papy & le Zoulou !

Tous sms d'encouragements bienvenus,
cette fois-ci on va VRAIMENT savoir !

Polo,
IX/XII

vendredi 20 août 2010

Et de IX ... mais il s'en est fallu de peu !



L'Embrunman


3.8 km de natation dans le lac de Serre-Ponçon


188 km à vélo (annoncés – un peu exagérément mais quand même – avec 5000m de dénivelé +) dont l’ascension du mythique Col de l’Izoard.


42.195 km de course à pied sur un parcours … tout sauf plat.


Chaud cet « Embrunman » ! Cette fois-ci, il s’en est fallu de très peu pour que tout s’écroule et que je doive abandonner mes espoirs de boucler ce « défi des XII » …


Une triple crevaison successive à moins de 25km d’arrivée du parcours vélo a longtemps semblé irréparable. Pincette, problème de jante, de fond de pneu ? Je ne le saurai sans doute jamais, mais après le remplacement de ma 3ème (et dernière !) chambre à air en l’espace … d’un bon kilomètre, je pensais que ma belle année 2010 allait se terminer sur une petite route de montagne surplombant la Durance. Sans parler de la bonne heure concédée au cours de ces multiples montages, démontages, gonflages (et dégonflagesL ) qui me rapprochait doucement des délais « couperets » m’empêchant de parcourir le marathon après le vélo …


Mais revenons quelques heures en arrière.


Debout à 3h45 ! C’est le record de l’année. Moi qui n’aime pas manger tôt, je suis servi. Spordej’, pâtes, bananes … je fais doucement le plein. Depuis l’hôtel de Chorges, il y a environ 25km à parcourir en voiture pour rejoindre le plan d’eau d’Embrun dans la nuit.


Pour cette 9ème épreuve, c’est Lucky qui m’accompagne. 6 semaines après son Ironman à Nice, et … 3 semaines avant un autre « logue distance » à Cologne, il vient se « promener » avec moi sur ce diabolique Embrunman. C’est dire le niveau du gaillard !


L’ambiance d’un parc à vélo le matin d’un Ironman est toujours assez particulière. Surtout à Embrun où le départ se donne bien avant le lever du soleil. Place aux derniers préparatifs, surtout un séchage en règle du vélo qui a subit un violent orage au cours la nuit, gonflage des pneus (hem …), préparation des sacs de transition, … il est temps d’enfiler la combi de natation et de se concentrer pour le grand départ !


Les derniers instants de ce genre d’évènement sont toujours assez émouvants. On sait que l’on s’embarque pour une fameuse aventure … mais on ne sait pas bien où elle va nous mener.


C’est parti. Contrairement aux meilleurs qui courent vers la flotte, je marche calmement vers la rive. Bonne surprise lorsque le glisse mes pieds dans le lac : l’eau n’est pas trop froide ! C’est déjà ça. Par contre, il fait bien sombre. J’ai l’impression de me trouver avec 20 autres personnes dans une même baignoire, alors que quelqu’un a éteint la lumière et qu’on n’y voit pas à 10 centimètres. Vous imaginez le tableau ? Les premières centaines de mètres sont donc assez difficiles, mais heureusement très vite ça se calme et je peux commencer véritablement à nager.
Nager, d’accord mais par où ? J’essaye de deviner la première bouée qui est (très légèrement) éclairée. Heureusement elle n’est pas trop loin et surtout, il me suffit de suivre le « banc de sardines » pour m’y conduire. La 2ème bouée est légèrement mieux éclairée et je parviens à m’y diriger tout seul. Par contre pas de trace de la bouée n°3 …


Et pour cause ! Je l’imagine là bas loin à droite (et c’est donc par là que je nage !) alors qu’elle est loin là bas … à gauche ! Il me faut un bon moment pour que je m’en rende compte et que je corrige le tir. J’en oublierais presque de nager. J’essaye alors de m’allonger sur l’eau au maximum et de ne faire quasi aucun mouvement de jambes, car elles doivent encore servir après ;-)


Finalement, malgré cette grosse erreur d’orientation du début, ça va plutôt bien et je passe un moment assez agréable dans l’eau (si, si !). Le soleil se lève doucement et les reliefs montagneux se découpent enfin autour du lac. Il fait sec (non, pas dans le lac), mais le ciel reste assez menaçant.


1h17 pour ces 3km800 de natation. Pas exceptionnel, mais finalement très honnête pour un fer à repasser de mon calibre. Je sors de l’eau pour préparer ma première transition. Bien, sûr, Lucky est déjà là, équipé, vélo en mains et piaffant d’impatience ! Il a donc bien décidé de « m’accompagner » au cours de cette loooongue journée …


Transi un peu longue, mais pourquoi se presser, et en route pour le vélo ! Première tuile mécanique : le compteur ne se met pas en route. Je m’arrête, je chipote sur le capteur, je le rapproche de la roue … rien n’y fait. C’est sans doute dû à l’orage et c’est bien embêtant. Me voilà parti pour 188km sans connaître ni ma vitesse ni ma position sur le parcours, ça c’est pas cool.


Le parcours à vélo débute très fort. A peine sorti du parc, la route s’élève et les pourcentages sont directement difficiles. Il n’est que 7h30 du mat, les jambes souffrent un peu pour se mettre dans le rythme. Mais au bout de quelques kilomètres, je commence à me sentir pas trop mal. Lucky se promène une 50aine de mètres derrière moi, il me surveille !;-)


Après cette première ascension, passage par St Apollinaire et première descente vers le lac de Serre-Ponçon. C’est magnifique, certains lacets donnent l’impression que l’on va plonger dans l’eau verdâtre ! Malheureusement, un concurrent est passé du rêve à la réalité et en ratant un virage a fait une sale chute dans les rochers ! Le SAMU est là, les médecins lui ont déjà mis une perfusion … voilà qui refroidit à l’aube d’une journée où les descentes vertigineuses se succèderont. Va falloir être prudent !


Les kilomètres s’égrènent, après la boucle autour du lac, le parcours prend la direction de Mont-Dauphin (superbe fortification Vauban !) puis de Guillestre pour rejoindre le pied de l’Izoard. Les gorges du Queyras sont magnifiques, même si un petit rayon de soleil ne serait pas superflu. Après une quinzaine de kilomètres de légère montée, les 15 dernières bornes menant au sommet méritent une concentration toute particulière. D’abord 3 ou 4 km de lacets assez pentus pour rejoindre Arvieux, puis une horrible ligne droite reliant les stations d’Arvieux, La Chalp et Brunissard, soit 2 à 3 km au pourcentage assez effrayant. Viennent alors les célèbres lacets, difficiles, certes, mais où les virages proposent chaque fois quelques mètres « plus calmes ». Je suis content de remarquer que « tout va bien ». Lucky a décidé de faire l’ascension à son rythme (comprenez qu’il est parti devant moi ;-)) mais le mien n’est pas mal non plus.


Passage par la « case déserte » et son superbe paysage lunaire … puis viennent déjà les derniers lacets pour atteindre le sommet. Malgré mon compteur récalcitrant, là je sais que nous avons déjà parcouru environ 100km. Une très bonne chose de faite.


Petit ravito rapide avant de préparer la descente. 20 kilomètres !


Et quel pied cette descente ! L’état de la route est parfait, la visibilité est impeccable … je prends un plaisir fou à enchaîner les courbes et les lignes droites, je dépasse même une bonne 10aine de voitures ! Aucune idée de ma vitesse (le compteur est mort !), mais c’est peut-être mieux ainsi ;-)


Briançon. Il est temps de revenir doucement vers Embrun. Les jambes sont toujours bonnes malgré un petit vent de face. Une première petite pluie est par contre moyennement bien accueillie. Mais elle ne dure pas.


Je sais qu’il me reste 2 difficultés majeure pour clôturer le parcours vélo : d’une part Champcella (moi je l’appelle le « Pallon » parce qu’elle y mène et que ce nom est source de jeux de mots stupides ;-)) c’est un « mur » d’environ 2km (donc pas long ;-) mais au pourcentage horrible et constant ! Puis viendra l’ascension finale de Chalvet (au 178ème kilomètre !), soit 4 kilomètres bien costauds à négocier, surtout placés si tard sur le parcours.


A ma grande surprise, le « Pallon » tant redouté est finalement très bien géré, malgré une seconde averse, bien plus mouillante que la première … je commence à faire mes calculs et je me dis que mon temps final « vélo » devrait s’approcher des 8h15/8h30. Franchement pas mal sur ce profil.


C’était sans compter sur la défaillance de mon vieux Cannondale. Savait-il qu’il effectuait un de ces derniers efforts après plus de 10 ans de bons et loyaux services ? En tous cas, alors que je n’avais pas crevé une seule fois en 2010, la poisse allait s’abattre sur ma roue avant …


Une heure de perdue. (Malgré une super solidarité de tous les triathlètes qui sont passés à côté de moi au cours de ce pénible moment …) Adieu veau, vache, cochon, couvée … car si un miracle garde enfin mon pneu gonflé jusqu’à la transition, je me retrouve bien sûr loin derrière maintenant. Je me dépêche dans Chalvet pour éviter d’être hors délais. J’arrive finalement 35 minutes seulement avant l’heure de mise hors course …


Et il me reste 42 bornes à courir.


Malgré la déception, je me mets donc en route. Les jambes ne tournent pas vite, mais elles tournent. Lucky m’attend chaque fois au ravito pour repartir avec moi … avant de m’attendre au ravito suivant ! ! Il me faut un peu plus de 2h20 pour parcourir les 20 premiers kilomètres … c’est le moment choisi par le ciel pour se déchirer en un orage apocalyptique ! Une pluie très abondante, très froide, et qui agresse ce corps en plein effort depuis plus de 12 heures … c’est vraiment la dernière chose que je souhaitais !


La 2ème moitié du Marathon est donc assez pénible … mais bien sûr pas suffisamment pour mettre ma motivation en péril. Le soleil se couche (il en a de la chance, lui) et comme pour le départ natation, la fin du parcours se fait dans l’obscurité ….


16h30. Ce n’est pas terrible mais je devrai m’en contenter. L’essentiel est de recevoir le T-shirt « Finisher » qui signifie que le défi court toujours !


En franchissant la ligne d’arrivée, je sais que seulement 11 jours me séparent de l’épreuve sans doute la plus dure …


Cette fois-ci, ça passe ou ça casse !
Polo
IX/XII

mardi 10 août 2010

Mini Trip(le) au Mont Ventoux


N'est pas fou celui qui gravit le Ventoux ... est fou celui qui y revient !

C’était un des casse-tête de mon programme : quand allais-je parvenir à « caser » le mini trip(le) au Mont Ventoux ? J’ai finalement dû opter pour un aller-retour express, avec départ de Bruxelles le mardi 3 août … et retour déjà le jeudi matin !


Séjour bref, donc, mais bien chargé ! Rappelons les conditions à remplir pour prétendre au statut de « cinglé du mont Ventoux » : Gravir à vélo, le même jour (entre le lever et le coucher du soleil), les 3 routes d’accès à son sommet, à savoir au départ de Bédoin, de Malaucène et de Sault. Simple, non ?


Avignon, mercredi 4 août, 5h30 du mat’. Je m’extirpe avec moult difficultés des bras de Morphée. Il faut dire que la nuit que je viens de passer n’a pas été des plus reposantes : Le Mistral a en effet secoué tous les arbres des alentours dans un potin de tous les diables, peu propice à un sommeil réparateur.


Petite impression de « déjà vu » avec un Nième petit déjeuner du condamné (je commence à avoir l’habitude, finalement je suis une sorte de condamné en sursis permanent cette année…), les céréales et le Spordej sont avalés sans grand enthousiasme. Mais je connais trop l’importance de ce repas pour le négliger …


40 km (les seuls que je ferai en voiture !) séparent Avignon de Bédoin, au pied du mont Ventoux … et pas besoin de GPS pour s’orienter depuis la cité des Papes, le profil du géant de Provence est visible de très loin … Brrr, il a l’air encore plus haut que d’habitude aujourd’hui. Par contre, le vent à l’air de s’être un calmé, bonne nouvelle … eeuh, en tous cas dans la plaine, parce qu’en haut, on en reparlera. (Ventoux signifie malheureusement venteux en provençal)


Assemblage du bon vieux Cannondale. Remplissage des bidons et des poches. (Miam ! des barres énergétiques, que du plaisir en perspective L …) Il ne me reste qu’une démarche administrative à accomplir, à savoir le pointage de ma feuille de route, et c’est parti ! Il est 8h00 lorsque j’aborde, sur mon fidèle destrier, la borne annonçant « sommet du Mont Ventoux à 22km » …


L’accès par Bédoin est généralement considéré comme « le plus difficile », et c’est d’ailleurs pour cela que j’ai décidé d’entamer la trilogie par cette face-là. Mais cette première ascension sera de loin la plus facile du jour. Bien sûr je la fais « à l’économie », et j’essaye de ne pas suivre quelques cyclos plus rapides que je pourrais très vraisemblablement suivre … je m’efforce de garder les pulses à 140-145 au tout grand maximum, et je mouline ! Les kilomètres à plus de 9% se succèdent, mais ils sont avalés sans trop de difficultés.


Au passage au Chalet Reynard, à environ 6 km du sommet, lé décor devient lunaire. C’est le début de la magie du Ventoux, mais malheureusement la disparition de la végétation redonne son plein pouvoir au vent ! Et ce foutu Mistral est malheureusement bien là … Quelques une de ses rafales tentent bien de me déstabiliser et le rythme d’ascension en est un peu ralenti, mais les jambes sont encore en pleine forme pour résister ! La gigantesque station météo du sommet est alors atteinte sans grosse difficulté.


Et de une !

Malgré un grand soleil, il ne fait pas encore bien chaud là haut, avec tout ce vent. C’est vrai qu’il n’est pas encore 10h. Je m’abrite alors pour un peu récupérer, pour manger, boire, et préparer la descente. Ce petit break est bien agréable et la vue est superbe.


Fini de rêvasser, direction Malaucène. La descente est très agréable et assez rapide … le compteur s’affole plusieurs fois à plus de 85km/h, avant que je décide d’être un peu plus prudent et de me méfier de l’une ou l’autre rafale qui pourrait avoir des conséquences … fâcheuses. Cela ne m’empêche pas de dépasser de nombreuses voitures et de prendre beaucoup de plaisir dans l’enchaînement des grandes courbes.


C’est la chaleur qui m’accueille dans la plaine. En effet le mercure est bien monté depuis mon départ de Bédoin. Ici, peu ou pas de vent et le soleil tape ! Il faut donc ne pas trop traîner si je ne veux pas fondre ! Remplissage de bidons, petite barre énergétique, tamponnage du road-book … et il est temps de songer à l’épisode 2.


Il est un peu plus de 11h lorsque je réenfourche « Bronco » pour quitter Malaucène (Alors complètement engorgé par la circulation en ce jour de marché). Trouver le bon rythme d’ascension est un peu plus difficile que 3 heures plus tôt, mais c’est normal, j’imagine. Et contrairement au profil de l’accès pas Bédoin, qui est régulier et progressif, cette montée est plus irrégulière alternant dès le début des pourcentages très forts et des zones plus faciles. C’est un peu plus cassant … mais je parviens à tenir le cap sans trop de problème.


Ce versant me semble par contre bien plus à l’abri du vent, ce qui est une bonne nouvelle … sauf que cela rend la sensation de chaleur plus éprouvante. (Jamais content, je sais)


Pour cette 2ème ascension, j’ai décidé d’illustrer l’effort et son magnifique décor par un petit fond musical. Comprenez par là que j’ai branché mon Ipod pour « penser à autre chose » qu’à la souffrance de mes guiboles ! En choisissant le mode de lecture « aléatoire » (parmi 1200 morceaux), je ne me doutais pas du sens de l’à propos (de l’humour ?) de cette petite machine …
Jugez plutôt de la play list ! Au cours de la partie finale de cette 2ème montée, le hasard ( ?) me propose d’affilée : Bicycle race de Queen, Stairway to Heaven de Led Zep et Solsbury Hill de Peter Gabriel… Vues les circonstances, avouez que ça ne s’invente pas ! Mais c’était sans compter sur le « walking on the moon » une fois arrivé sur la partie « lunaire » de la montagne (à peine croyable, je l’avoue) … pour franchir la ligne d’arrivée du sommet pour la 2ème fois de la journée en écoutant un très symbolique « High hopes" de Pink Floyd ! (Plus « private joke », je l’admets)


Pour résumer, la fin de cette 2ème ascension a été un rien plus difficile que la 1ère, mais la douleur ( !?) a été très supportable. La fréquence cardiaque n’a jamais dépassé les 155 et les jambes ont plutôt très bien tenu le coup. J’avoue même me sentir un peu euphorique …


Et de 2, donc !


Il est un peu plus de 13h et il y a un monde fou là haut à cette heure-là… pas facile de trouver un petit coin pour déposer mon vélo et m’asseoir à l’abri du vent. Je parviens néanmoins à m’installer face au soleil et je savoure le moment. Je mange, je bois, j’envoie l’un ou l’autre sms … J’ai d’ailleurs un peu l’impression d’avoir déjà rempli ma mission du jour (la montée par Sault est tellement plus facile m’a-t-on dit …) mais bien sûr la suite me donnera sérieusement tort !


La descente vers Sault est très différente. D’abord 6km dans le vent jusqu’au Chalet Reynard (les mêmes 6 km de la route de Bédoin), puis à gauche pour 20 autres longs kilomètres. Longs parce que le revêtement de la route est moins bon, longs parce que la pente est moins prononcée et que donc la vitesse est réduite, longs surtout parce qu’il est temps d’en finir avec ce 8ème travail ! ;-)


Le village de Sault est beaucoup plus petit et plus calme que les 2 autres. J’arrête mon engin à l’ombre de quelques arbres qui bordent la place principale, je me ravitaille en liquide au petit magasin du coin et je vais faire « tamponner » mon road book à l’office du tourisme.


J’ai faim. Il me reste bien sûr plusieurs succulentes ( !?) barres énergétiques dans la poche arrière … mais l’envie de « salé » est très présente. Une petite échoppe sur la place vend des crêpes … et des quarts de pizzas ! Je n’hésite pas longtemps avant d’acheter et de dévorer 2 quarts de pizzas Margherita... ca fait un bien fou !


Je sais que pour courir, ce genre d’écart alimentaire serait une grosse erreur, mais je me dis que pour rouler, cela ne posera pas de problème. Je suis d’ailleurs sûr d’avoir fait le bon choix en me remettant en selle, et je ne changerai pas d’avis avant … 15km. Départ de Sault. Il me reste donc 26km pour achever mon travail n°8.


Pour bien comprendre les données du problème, précisons que les 2 premières ascensions correspondaient chaque fois à un dénivelé positif de +/- 1600m sur 21 (Bédoin) et 22km (Malaucène), cette troisième route n’accuse que 1200m de D+… sur 26km. Moins de dénivelé sur un trajet plus long : c’est clair, le pourcentage moyen est plus faible et cela devrait être donc beaucoup plus facile !


Cette belle théorie va vite s’avérer fausse. Car c’était bien sûr sans compter sur mes pauvres jambes qui commencent doucement (mais surement) à se rebeller en manifestant quelques signes de fatigues. En effet, les pentes à 5% sont perçues comme faisant du 7. Ca ça va encore. Mais bien sûr les morceaux à 7 ou 8% sont perçus comme faisant du 9 ou du 10. Et ça, ça va nettement moins.


Les kilomètres s’égrènent donc un peu plus difficilement que prévu, la beauté des champs de lavande ne parvenant pas à compenser la douleur lancinante qui commence à s’installer. Bah ! Je me dis que cela aurait été trop facile si je n’avais pas éprouvé quelques difficultés !


C’était oublier le passager clandestin embarqué à Sault ! En effet, c’est ici que l’on reparle de la copine Margherita (oui, la pizza !). Elle semble ne pas avoir envie de m’accompagner jusqu’au sommet et manifeste quelques signes désagréables pour quitter mon estomac prématurément … L’excellente idée du « goût salé » se transforme doucement en cauchemar. Après quelques hésitations (que je ne vous décrirai pas ;-) Margherita décide de couper la poire en deux, à savoir ne plus être tout à fait dans l’estomac … mais ne pas remonter jusqu’à faire « le grand retour! ».


C’est donc dans ces conditions assez difficiles (et sans mettre le pied à terre) que j’arrive à nouveau au chalet Reynard pour les 6 derniers kilomètres. Le dernier accès au sommet ne va pas être une partie de plaisir. Le vent souffle plus fort que ce matin, la pente est perçue comme beaucoup plus raide, les jambes trinquent … seul le cœur reste imperturbable est c’est déjà ça de pris !


Mais ce n’est pas cette demi-heure de souffrance assez intense qui va diluer le plaisir de cette journée ! Je déconnecte les fils « douleur physique » … et j’arrive enfin au sommet !


Et de trois ! Contrat rempli, me voilà officiellement « cinglé du Ventoux » et je suis assez fier de mon nouveau titre.


Ce troisième arrêt au sommet est bien sûr un plus long. Je savoure le moment et je fini par digérer la pizza ! Il ne me reste plus qu’à basculer une dernière fois dans la pente pour rejoindre Bédoin … Il ne faut traîner pour rentrer à Bruxelles, récupérer un peu et préparer l’enchaînement de fou qui m’attend dans quelques jours.


Mais ça ce sera une autre histoire !

Polo VIII/XII